Votons CMB !

Pour les Européennes, je vote CMB. On peut toujours rêver, non ? CMB pour Concours Mondial de Bruxelles. Si l'Europe était organisée - pas dirigée - par une équipe telle que ces Belges fous, on serait bien plus heureux !

Réunion au sommet entre la Belgique (représentée par Louis Havaux, fondateur du CMB)
et l'Allemagne (le dégustateur et journaliste Michael Hornickel). Et le sourire de Selveggia en arrière-plan.
Voilà comment l'Europe devrait être, unie et joyeuse !

Cela fait bien longtemps que je participe au Concours Mondial de Bruxelles comme dégustatrice et présidente de jury (quelle confiance ils ont en moi, mon dieu !). Je ne compte plus les années, depuis une bière mémorable bue devant les caméras belges à Bruxelles en compagnie de Louis Havaux, le fondateur. Quand il créa cette compétition qui vise à décerner des médailles à des vins du monde entier, pensait-il en 1994 que son CMB deviendrait un tel événement, un tel pèlerinage, un tel voyage culturel et viticole pour les participants ?

Je ne compte plus non plus les anecdotes, les souvenirs, les images, les fêtes, les danses, les concerts comme les fameux Gilles en Belgique ou les voix bulgares à Plovdiv où soudain, tout le monde d'un seul élan se fond dans le pays qui nous accueille et nous offre le meilleur de lui-même. Je ne compte pas les rencontres avec, par exemple - Yves et Hélène, vous souvenez-vous ? - le ministre de l'Agriculture portugais à Lisbonne qui nous confiait, en marge des dégustations, tout le respect qu'il avait pour le vin, en 2006, au moment où la Loi Evin étouffait la France. Cet homme nous faisait rêver.

Bon, petit rappel pour ceux qui ne connaissent pas.

CMB 2018, à Haidian (Pékin). Dans mon jury, un Chinois et un Hong-Kongais qui habite à Londres et représente l'UK.
Je vote pour l'harmonie dans le monde entier. Comme dans le monde du vin, où elle existe vraiment.

Le Concours Mondial de Bruxelles réunit tous les ans, début mai, plus de trois cents dégustateurs de plus de cinquante nationalités différentes, avec un objectif clair : juger plus de 9 000 vins. Ces vins sont répartis en trois matinées et dégustés dans le calme et le respect, par une soixantaine de jurys composés de cinq ou six dégustateurs. Pour chaque jury, cela correspond à une cinquantaine de vins par séance. Je pense honnêtement pouvoir dire que tous autant que nous sommes, les 350 , nous mettons toute notre concentration et toute notre expertise dans le verre. Journalistes, acheteurs, oenologues, cavistes, formateurs, sommeliers, vignerons, vinificateurs, winemakers, restaurateurs, directeurs d'interprofessions, critiques, bref, tous les métiers de la vigne et du vin sont représentés. Pour décerner des médailles - une garantie pour le consommateur - nous goûtons (nous recrachons bien sûr), et nous décidons, en donnant des notes, quels vins représentent pour nous et pour le consommateur un réel plaisir.

L'art de la réception

Nous faisons notre boulot avec le plus grand sérieux : c'est pour cela que nous sommes conviés. Mais dès le dernier vin dégusté de la matinée, lâchés comme des fauves, nous sommes les plus gâtés des dégustateurs, les plus gourmands, les plus heureux, les plus comblés. Car cette fameuse équipe menée par la famille Havaux a l'art de la réception. Après une dizaine d'années en Belgique, le concours tourne tous les ans dans un pays nouveau, ce qui le rend unique.

Et c'est là que je vote pour le CMB. Rarement vu un événement qui réunit autant de nationalités différentes qui se sentent aussi unies et si peu divisées, comme on le voit trop souvent - parce que les gens ont peur et ne se connaissent pas. Certes, il s'agit d'un milieu privilégié, ce monde du CMB, voué aux richesses de la gastronomie et de la viticulture, un univers dont l'équilibre financier est achevé grâce avant tout aux producteurs de vin qui présentent leurs échantillons (ils paient plus de cent euros la bouteille soumise), grâce à de nombreux sponsors (les fidèles Sylvain le tonnelier, Amorim les bouchons portugais, les Vins du Valais, pour ne citer qu'eux, mais ils sont très nombreux !) et aussi grâce à un fin négociateur, le directeur Baudouin Havaux - le fils de Louis - capable d'une année sur l'autre d'installer son paquebot aussi bien en Sicile qu'au Portugal, et même en Chine.
Rarement vu un séminaire qui allie aussi bien travail intense, visites culturelles, découvertes viticoles et gastronomiques, échanges entre professionnels du monde entier.


Le château de Chillon, au bord du lac Léman,
et les Alpes depuis Leysin, au-dessus d'Aigle.
Nous sommes plus que gâtés.

Nous ne sommes pas des machines

En plus de quinze ans, je n'ai jamais vu un accroc, ni le ton monter entre deux dégustateurs ou deux membres de l'équipe, par exemple. Plutôt des éclats de rire, des cris de joie, des embrassades. Certes, je vois parfois la mine fatiguée de Boudouin, usé par ses obligations diplomatiques - et vous imaginez le haut niveau de diplomatie du bonhomme !-, Selvaggia ou Stefania un peu en panique devant quelque petit souci du jour, mais jamais trop, toutes ces grimaces et ces nuages aussitôt effacés par un soleil radieux : Louis qui, du haut de son bel âge, règne en doux retrait sur l'ensemble du concours.

Comment cette équipe, répartie entre la Belgique, la France et l'Italie, arrive-t-elle, toujours avec le sourire, toujours avec la solution, à gérer ces sales caractères, ces dégustateurs exigeants, ces différences inouïes entre des palais québécois, argentins, grecs ou norvégiens ? Comment arrivent-ils à lisser les difficultés sans que l'un de nous ne perce la moindre sentiment de gêne ou de malaise ? Benoît avait une rage de dent le deuxième jour : l'équipe lui trouve une clinique dentaire juste à côté de vélodrome d'Aigle (Centre mondial du cyclisme) où nous avions la chance cette année de nous concentrer pendant trois matinées.

Les copains d'abord, dans le funiculaire entre Leysin et Aigle, un soir de beuverie. En toute dignité.

Nous ne sommes pas des machines et nos CMB men and women le savent. Nous sommes des êtres humains avec nos faiblesses et nos sentiments, nos bagages aussi divers que nous sommes nombreux. Beaucoup de juges vivent ailleurs que dans leur pays d'origine. Jacques est Français et vit au Québec, Nicolas aussi mais il est en Norvège, moi je vis en Hongrie, Sharon est Anglaise et vit dans le sud de la France, et ainsi de suite. Ce qui ajoute à ce beau melting pot. Le Melting Pot du CMB.

Nous sommes 350 juges aussi différents par leurs expériences que par leur perception et leurs goûts (je n'aime pas les vins trop boisés par exemple qui peuvent plaire à des Américains, les oenologues distinguent tous les défauts du vin, les brett par exemple, ils en voient presque dans tous les vins...). Nous échangeons nos avis, croisons les informations. C'est ce qui rend cette rencontre passionnante.

L'équipe du CMB s'adapte aux nouvelles technologies, aux exigences du monde. Les tablettes électroniques ont remplacé les fiches en papier et le stylo bic. En Suisse, elle se met au vert avec des détails qui comptent : fini le plastique, des carafes à eau remplacent les bouteilles sur les tables des dégustateurs. Sans cesse se renouvelle. Se met en quatre, pour nous acheminer jusqu'au lieu du concours - même quand un vilain nuage de volcan islandais fout le bazarre dans tout le ciel européen -, nous loger dans les meilleures conditions, nous faire partager les mets, les paysages (lever du soleil sur les Alpes, croisière sur le Léman avec vue sur le Lavaux classé au Patrimoine mondial de l'Unesco) et les spécialités du pays. Des fausses notes ? Peut-être. Très peu, au fond, et s'il y en a, interdiction de se plaindre. C'est du pain béni, une offrande tous les ans servie sur un plateau avec le meilleur goût et le plus beau sourire. Ce bel assemblage de goût mérite d'être cité.

Palme d'or de la gentillesse

Une telle équipe qui organiserait (et encore une fois pas dirigerait !!!) notre chère Union européenne si malmenée et si critiquée, si bêtement divisée, ce serait le début du bonheur. L'art de rassembler des personnalités du monde entier, une fois par an, dans des pays très différents les uns des autres, avec les valeurs clés les mieux bien partagées : la culture, l'ouverture, l'écoute, la compréhension, l'acceptation de l'autre, la richesse de nos différences, la gentillesse, oui la gentillesse (essentiel, non ? Avec la palme d'or à Bernard Sirot !). Et le VIN.

A gauche, Thomas Costenoble, le directeur technique
sans qui les vins n'arriveraient jamais dans nos verres. A droite, la Palme d'or de la Gentillesse, Bernard Sirot.

Merci à Louis et Agnès Havaux, Baudouin Havaux, Quentin Havaux, Thomas Costenoble, Bernard Sirot, Stefania Manfredi, Selvaggia Oricchio, Didier François, Nicolas Joss, Karin Meriot, Patricia Pereira Marques, Anne Serres, Jojo notre Pékinoise ! et tous ceux qui contribuent tous les ans à faire de la magie de ce CMB. Une famille qui s'agrandit tous les ans avec des gens de tous pays draînés par les mêmes fibres positives.

Merci (interdiction de les oublier !) à tous les producteurs, plus de 9 000, qui font confiance au CMB et aux dégustateurs et envoient leurs échantillons en plusieurs exemplaires. Après tout, c'est grâce à eux, à cette grande cavalerie de bouteilles, que l'on se rencontre tous les ans au mois de mai. Big cheers !!!

Merci aux écoles de sommellerie de chaque pays de nous offrir leurs services. Tiens, voici John cette année, il est de Hong-Kong. Il est étudiant à la Swiss Hotel Management School.

John et le jury 61 à Aigle, Suisse.

Un grand merci aussi à ceux qui m'ont reçue après le concours cette année, en Suisse, grâce à Nicolas Joss qui m'a tout organisé : Andréa Conconi et Remo Tettamanti de Ticinowine (Tessin), Martine Delaloye et Gérard-Philippe Mabillard (Valais) et Michael Hock à St Jodern (Visperterminen). Et dans les autres pays, je pense en particulier à Christophe Sepulveda et Meglena Mihova (Probegex), un couple belgo-bulgare, parents de cinq enfants, qui m'ont organisé  un beau reportage en Bulgarie. Eux aussi, comme par hasard, sont depuis l'édition de Plovdiv en 2016, partenaires du CMB !

PS. Le 26e Concours Mondial de Bruxelles a eu lieu en Suisse, tout autour de Aigle. La toute première hors Belgique fut lancée à Lisbonne, en 2006. Ont suivi Maastricht, Bordeaux, Valencia, Palermo, Luxembourg, Guimarães (Portugal), Bratislava, Bruxelles (retour à la maison pour les 20 ans), Jesolo près de Venise, Plovdiv en Bulgarie, Valladolid en Espagne, en 2017. En 2020, Brno en République Tchèque accueille la 27e édition !

Meglena et Christophe Sepulveda.


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