Quand nos coeurs meurent et revivent

Pendant que le coeur de Paris s'effondrait, celui de ma mère se remettait à vivre. Etrange coincidence du temps et de la vie.

Notre Dame, notre chère dame.
Maman fut opérée - pour la pause d'un TAVI (transcatheter aortic valve implantation) - juste avant que les premières flammes de Notre Dame ne se déclarent. Je n'étais pas sur place. Je peux imaginer le spectacle douloureux et brûlant de notre belle cathédrale en feu, retransmis à la vitesse de l'éclair par tous les médias - France Inter et réseaux habituels. Nous avons tous été secoués. J'ai attendu, tout en regardant la pointe s'effondrer à travers vos posts - des nouvelles du bloc opératoire d'un hôpital proche de Versailles. Elles sont venues bien après. "Elle va bien". C'est tout ce que j'ai pu savoir. "Elle va bien". Ma mère. Ohhh, elle bien jeune cela dit, 88 ans de chair et d'os (et d'un sacré caractère) ! Si jeune, comparée aux presque mille ans de la dame de pierre et de bois.

Pour moi qui habite dans mes étoiles, au nord-est de la Hongrie, à Paris j'y ai mon coeur, mon origine, mes racines. Comme vous tous, Parisiens, non Parisiens, Français, Européens, amoureux du monde entier, archevêques, religieux et non religieux, politiques, non politiques, mairesse de Paris, amis et touristes, j'ai senti mon corps fondre et mes tripes brûler à la vue de ces flammes. Vous avez tous réagi à votre façon. Des posts très personnels révélant votre style. François à écrit "Gémissons", illustrant une photo du brasier vu du ciel. Frédérique nous parle des oiseaux et des bêtes prisonniers de la fournaise. Les compagnons du Tour de France rappelaient, quelques clichés à l'appui, le côté exceptionnel de la charpente millénaire, surnommée La Forêt.

Libé a trouvé le titre parfait qui lui permet comme toujours de bomber le torse. Notre Drame. France Inter a changé son programme de 7 à 9 heures. Et Augustin Trapenard, l'excellent journaliste de Boomerang, a construit son émission en urgence sur le triste événement en invitant au pied levé notre ex-ministre Jack Lang.

Notre Dame d'Olaszliszka, née en 1635. Une jeunette !

Pendant ce temps, le feu s'est calmé, les dégâts sont énormes. Les tours sont sauvées, la fameuse couronne d'épines aussi. Les faucons sont partis.

Notre président a, à 20 heures le 15 avril, au plus grand défoulement du feu, a évité de s'exprimer face à ses compatriotes, comme c'était prévu. Nombreux ne manqueront pas de faire un lien avec ce changement de programme et, après l'émotion, nous aurons sûrement droit à la litanie des complots et les critiques propres aux Français, sur les promesses de don, par exemple - d'Arnault à Pinault au passant par l'Etat et tous ceux qui souhaitent voir la belle se reconstruire au plus vite - qui iront à Notre Dame et pas aux gilets jaunes. Même si cela n'a rien à voir.

Notre Dame est meurtrie, Ma Dame (que nous appelons entre frère et soeurs Queen Mamine) est ressuscitée. Au téléphone, sa voix sonne juste comme avant son opération. Mais elle aussi, elle pleure notre joyau. Car à peine réveillée, nichée dans son lit d'USIC (Unité de soins intensifs cardiaques), elle était au courant de la catastrophe. Qui ne le pleure pas ?



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